Sborník prací FF BU
SBORNÍK PRACÍ FILOZOFICKÉ FAKULTY BRNÌNSKÉ UNIVERZITY
STUDIA MINORA FACULTATIS PHILOSOPHICAE UNIVERSITATIS BRUNENSIS
B 45, 1998
PETR HORÁK
L'intellect et la volonté: la théorie pure du droit et la
raison éuropéenne.*1
L'idée principale de mon texte m'a été suggérée par la question
suivante : est-ce que la théorie pure du droit sort ou non du
cadre de la raison éuropéenne pour autant que nous considérons
cette raison éuropéenne comme héritière légitime de deux composants
essentiels, à savoir du droit romain et de la science moderne?
Il pourrait paraître étrange de limiter à tel point le concept
de la raison éuropéenne que ni l'art, ni la littérature, ni la
philosophie et la théologie chrétienne non plus n'y trouvent
pas leur place, mais admettons la proposition que se sont surtout
le droit romain et la science qui sont à l'origine de la raison
éuropéenne, qui sont le plus responsables de sa constitution2.
La proposition se justifie à beaucoup d'égards, sans doute;
il est indéniable qu'encore aujourd'hui on pourrait difficilement
nier l'importance de ces deux composantes historiques de la raison
éuropéenne, bien présentes toujours encore, en dépit de leurs
formes contemporaines parfois très éloignées ou très transformées
par rapport à celles qui furent les leurs aux débuts de la
modernité éuropéenne. Certes, ceci est surtout vrai pour la science
contemporaine. Cette proposition semble néanmoins mettre en doute
la légitimité de la présence parmi les composants de la raison
éuropéenne des théories qui comme la théorie pure du droit de
Hans Kelsen, prétendent de se passer de la tradition du droit
romain pour mener à bien un projet de faire du droit positif
l'objet d'une science pure, en niant en même temps que les procédures
d'argumentation et les catégories jugées comme rationnelles tirées
de l'arsenal du droit romain et de sa jurisprudence auraient
eu qui que se soit de commun avec la théorie scientifique dans
le sens moderne et contemporain.
Il est pourtant évident que la théorie pure du droit appartient
à la raison européenne non seulement grâce au simple fait que
ses deux fondateurs, Hans Kelsen et Franti(unknown char)ek Weyr, étaient originaires
de l'Europe centrale mais surtout par l'effet de sa constitution
philosophique et théorique qui en fait une partie prennante de
la raison éuropéenne. S'il est indéniable que de ses débuts la
théorie pure du droit a provoqué de fortes réserves de la part
des partisans d'autres conceptions du droit qui de leur côté
ont soulevé des critiques pouvant jetter comme une ombre de doute
et de l'ambiguïté en ce qui concerne le droit de cité de la
théorie pure du droit dans le champ de la raison éuropéenne,
surtout si on limite la constitution de celle-ci par la science
moderne d'une part et par le droit romain de l'autre, force est
de constater que cette ombre de doute est due entre autres à
une méconnaissances de ses bases philosophiques.
Ces remarques préliminaires enchaînent plusieurs remarques suivantes
en vue d'une réflexion sur le rôle de la théorie pure de droit
dans la "raison éuropéenne".
1° Première remarque :
a) Bien que la science expérimentale moderne naissante ait pu
s'inspirer - au moins d'une certaine façon - de l'exemple des
catégories du droit romain qui y sont très présentes comme
celles de la "preuve", de la "démonstration" et d'autres encore
(surtout pour ce qui est de la catégorie de "loi", quoiqu'il
me semble qu'il faille chercher l'inspiration majeure de celle-ci.plutôt
du côté de l'Ancien Testament) et bien que la pratique de la
démarche argumentative rationnelle qui fut et reste celle des
juristes en général (et des casuistes jésuites) et pas du tout
seulement de ceux que nous aimons nommer romanistes, ait pu influencer
la démarche de l'argumentation scientifique moderne, ce qui me
paraît plus que probable, force est de constater que la science
moderne est arrivée progressivement à créer par elle-même
ce qu'on appelle la "théorie" scientifique; l'étude de la théorie
et de la pratique du droit romain ne pouvaient pas contribuer
beaucoup à sa constitution, tout au contraire, ainsi qu'essaya
de le démontrer justement la théorie pure du droit. La tradition
d'une démarche argumentative rationnelle ne se limitait d'ailleurs
pas à la sphère du droit romain : elle s'appuya sur d'autres
sources aussi, dont la philosophie grecque, la logique et la
rhétorique scholastiques n'ont pas été de moindres.
b) La théorie pure du droit fait, elle-aussi, intégralement partie
de la tradition scientifique de la raison éuropéenne. L'effort
de constitution d'une telle théorie scientifique - qui cautionnerait
une science particulière aussi bien dans sa hiérarchie intérieure
que dans son insertion au sein de l'hiérarchie complexe de la
Science - me paraît s'inspirer beaucoup plus de la philosophie
et de l'évolution de différentes sciences - l'histoire est ici
connue - que du droit romain. Cet effort de constitution remonte
à vrai dire aux débuts de la science moderne. Et bien que nous
préférions aujourd'hui le discréditer en l'inculpant du pêché
capital à nos yeux, à savoir de n'avoir pas rien créé d'autre
qu'une suite de métadiscours para-idéologiques de légitimisation
ou de métanarration, il n'en reste pas moins qu'il a été, des
ses débuts, lié aux plus bels exploits des philosophies transcendantales
comme celles de Descartes et de Kant.
c) Il est beaucoup moins évident que ne le prétend discours actuel
que la raison éuropéenne soit issue définitivement de cette quête,
jugée par l'actuel discours philosophique comme désespérée, à
savoir de la recherche d'une métanarration idéale et définitive
: il paraît tout au contraire significatif que la raison éuropéenne
dans sa forme actuelle, en dépit de fait qu'elle fait siennes
les hypothèses contemporaines selon lesquelles la science n'est
qu'un vaste champs langagier toujours plus ouvert de sciences
spécifiques (dans le sens bien entendu de langues particulières)
s'étant constituées uniquement à la base d'un consensus interne et
pas du tout à la base d'un consensus vraiment universel, ne
cesse de rechercher dans cette formule qu'une nouvelle ultime
"raison", le justifiant en fin de compte. S'il en est ainsi,
alors cette "raison" semble en effet justifier paradoxalement
l'une des idées fondamentales de la théorie pure du droit, à
savoir celle de son autosuffisance.
2° Seconde remarque :
a) La théorie pure du droit, liée à juste titre au nom de Hans
Kelsen et de Franti(unknown char)ek Weyr, est l'héritière directe de la philosophie
néokantienne. Force est de constater que cette héritière de
la philosophie néokantienne, héritière mal aimée et mal considérée
par les juristes aussi bien coeux formés à l'école du droit
romain continental que ceux qui se réclament de la tradition
de la Common Law britannique et d'autres pays anglophones
éventuellement, fut née dans le milieu autrichien, pour ne pas
dire viennois tout court. C'est-à-dire dans le courant d'une
réflexion bien spécial sur la philosophie, sur le droit et sur
la sciences sociales en générale caractérisant la pensée äutrichienne"
du fin de 19e et du début de 20e siècles.3 Il est d'ailleurs assez significatif que dès que le fondateur
de la théorie pure du droit s'éloigna de ce berceau aussi bien
spirituel que réel de sa théorie - en y étant forcé par les
avatars de sa biographie personnelle intimmement liée bien évidemment
à l'histoire difficile de la première moitié de ce siècle
- sa théorie a perdu, au moins en partie, sa pureté et sa limpidité
théoriques qui l'avaient marquée à ses débuts.
b) C'est en ce sens que l'un des meilleurs spécialistes de la
théorie pure du droit, professeur Franti(unknown char)ek Weyr - l'un des meilleurs
de fait qu'il en était cofondateur avec Hans Kelsen4 - a pu diagnostiquer
en 1936 déjà que la théorie pure du droit, tout en s'appuyant
au début sur le dualisme noétique kantien du Sein et du Sollen,
donc sur le dualisme de la raison pure, connnaissant ce qui est,
de l'intellect d'un côté et de la raison pratique, transformant
notre volonté en ce que nous jugeons comme nécessaire, ou désirable,
en ce que devrait être, de l'autre côté, a subi entre la 1ère
et de la 2e éditions des Hauptprobleme der Staatsrechtslehre
de Kelsen, donc entre 1911 et 1923, une transformation ou une
mutation : Kelsen cesse de considérer la théorie pure du droit
comme la théorie transcendantale du droit, pour en faire une
doctrine de normes du droit. Weyr prend cette mutation pour de
la résignation de la part de Kelsen au dualisme noétique kantien.
Cette résignation est due, toujours selon Weyr, à l'influence
de la philosophie d'Ernst Mach, de l'agnosticisme radical de celui-ci,
de l'idéalisme méthodique radical d,Hermann Cohen et de la phénoménologie
d'Edmund Husserl du temps des Ideen (1913) et des Logische
Untersuchungen (1922)5.
c) Cette mutation, ou transformation, advenue dans les bases
noétiques de la théorie pure du droit ne semble pas beaucoup
changer les rapports d'amitié et d'estime mutuels entre Weyr et
Kelsen, elle nous incite pourtant à nous poser une première
question : quelle était alors aux yeux de Weyr la philosophie
fondamentale sur laquelle s'appuya la théorie pure du droit,
aux moments de sa première formulation et rédaction aux abords
de la Grande Guerre? et ensuite une seconde : qu'est-ce que Weyr,
fort de cette philosophie, a pu reprocher aux conceptions classiques
du droit qui se réclamaient le plus souvent d'une approche historique
et sociologique, illustrée pour lui surtout à l'exemple du
droit romain et de recherches qui lui ont été réservées?
1. Nous l'avons indiqué déjà, Weyr considère comme le signe
essentiel de la théorie pure du droit le dualisme noétique de
l'intellect et de la volonté, du Sein et du Sollen. Peu
nous importe s'il reproduit, s'il interprète fidèlement la
distinction noétique kantienne de la raison pure et de la pratique,
l'important est que son postulat s'appuie sur cette distinction
: "...seule la séparation théorique de l'intellect et de la volonté
permet une connaissance théorique scientifique pure n'ayant aucun
autre but qu'elle-même. L'intellect, dans son tavail de connaissance,
ne veut rien - mais désire arriver à la connaissance"6. Cette connaissance "... posède de ce fait
la qualité d'être impartiale et objective"7. En évoquant ici l'impartialité et l'objectivité
äbsolues" d'une telle connaissance où l'intellect s'abstient
consciemment de toute volonté et de tout désir de posséder ou
de créeer quoi que ce soit, Weyr fait allusion non seulement
à Kant mais aussi à Schopenhauer - il le cite plusieurs
fois, aussi bien dans l'ouvrage déjà plusieurs fois cité que
dans le manuscript, jusqu'alors inédit, de ses Mémoires.
Le postulat philosophique que nous venons d'émettre prend particulièrement
corps dans le concept clé de la théorie pure du droit, le concept
de "norme". Celle-ci n'est en effet rien d'autre que la forme
particulière de l'intellect, tandis que son contenu n'est que
ce qui doit ou devrait être. Le concept de norme englobe ce
dualisme noétique mentionné plus haut8. Si nous acceptons, bien qu'avec une réticence,
de reconnaître la dette de la science moderne envers le droit
romain, il faut également reconnaître que la théorie pure du
droit a pris comme sien l'idée de la science contemporaine que
la "loi" n'est rien d'autre qu'une"norme", le concept de la "norme"
pour la théorie pure du droit correspondant exactement au concept
de la "loi naturelle" comme l'ont développé les sciences contemporaines.
Weyr ne s'y trompait pas, lorsqu'il affirmait que les lois de
la nature ne sont rien d'autres que la forme externe de nos connaissances
scientifiques sur la nature. Il allait plus loin encore en affirmant
que la source commune et du concept et de la notion de loi de
la nature et de norme ne devait pas être cherchée ailleurs
que dans la pensée normative en tant que telle9, tout en suggérant ainsi implicitement
l'unité fondamentale de toute science "vraie". Nous retombons
de nouveau dans l'univers de la philosophie viennoise de l'époque
bien que Weyr lui-même n'en ait pas soufflé un mot. C'est donc
le concept tout d'abord et ensuite la notion de norme auxquelles
se rapporte en effet au mieux le projet kelsien et weyerien d'une
"théorie pure du droit".Toutefois l'une des sources et ensuite
l'un des buts avérés de ce projet, sinon l'un des buts principaux,
fut également la critique de tout historicisme et de tout sociologisme
dans la science du droit, considérés par Weyr (et Kelsen) comme
l'expression du subjectivisme méthodologique, ou comme l'expression
d'une volonté plus ou moins bien cachée d'influencer le droit
positif pour des raisons politiques, idéologiques ou autres.
2.Il est bien évident que l'approche rigoureusement dualiste
du problème de la connaissance en matière du droit et de
sa théorie a rendu pertinente la critique qu'a faite la théorie
pure du droit à la rencontre d'autres théories du droit, la
théorie pure du droit tout en critiquant la faiblesse théorique
du droit romain sinon l'absence de toute théorie à proprement
parler dans le droit romain. Il est à remarquer que la théorie
pure du droit considère le droit romain comme un cas typique
d'un droit crée uniquement par l'intérêt pratique. La jurisprudence
romaine nous a laissé un ordre juridique concret, dont elle se
savait magnifiquement servir, sans s'occuper de théorie à proprement
parler10. Le droit
romain reste un trésor immense de jurisprudence concrète, historique,
en revanche du point de vue théorique, ce corpus de jurisprudence
si apprécié par tant de générations de juristes ne vaut pas trop
aux yeux des fondateurs de la théorie pure du droit.
3° Troisième remarque :
Il faut se rendre compte que la critique qu'ont portée Weyr et
Kelsen à l'encontre de toute théorie du droit qui se voulait
être empirique, historique ou sociologique heurtait de front
l'approche positiviste de la science en générale. Il est évident
que la théorie pure du droit préféra une approche théorique au
lieu d'une description pure et simple des "faits". Force est
de constater que de ce point de vue la théorie pure du droit
s'apparente beaucoup plus à ce que Gaston Bachelard appelait
"le nouvel esprit scientifique" qu'aux concepts positivistes
de la science, car elle rend compte de l'aspect constructiviste
de toute théorie digne de ce nom.
Weyr et Kelsen sont sortis tous les deux du même creuset d'idées,
nous l'avons déjà dit. Bien qu'il ne soit pas possible dans
les limites de ce texte de développer un peu plus l'arrière-plan
philosophique de la théorie pure du droit, bien que Weyr ait
cru discerner dans le développement théorique ultérieur de son
ami Kelsen un certain fléchissement par rapport au sien, en ne
cessant pourtant jamais apprécier l'apport théorique considérable
de Kelsen à l'évolution de ses propres idées, force est de
constater que du point de vue de ses propres convictions philosophiques
il restait tout au longue de sa vie fidèle à un seul corpus
philosophique. Il l'a constitué très vite11.
Ce corpus brillait par la présence de Kant, de Schopenhauer -
nous l'avons déjà dit - mais aussi par celle d'Otto Weininger
et de Hans Vaihinger, de deux philosophes très à la mode
dans les deux premières décenies de ce siècle dans le milieu
germanophone en générale et dans le milieu viennois en particulier.
Mais l'essentiel de ce corpus fut fourni par la philosophie de
Schopenhauer12, surtout par deux ouvrages de cet auteur,
à savoir de ses livres Die Welt als Wille und Vorstellung
et Über die vierfache Wurzel des Satzes vom zureichenden
Grunde. Ce dernier ouvrage a renforcé la conviction chère à
Weyr de la nécessité du dualisme noétique. Et comme l'exprime
Weyr dans ses Mémoires, il n'a pas cru nécessaire tout au
longue de sa vie de se départager de la philosophie schopehaurienne
: ni de ses postulats noétiques, ni de la sagesse de son auteur.
4° Conclusion :
Le texte présent fut stimulé par le doute sur la légitimité de
la proposition droit romain, science moderne : la raison
éuropéenne qui m'a paru limiter excessivement la raison éuropéenne
à une seule composante, je l'ai dit tout au début. Le fait
que la théorie pure du droit (ou la jurisprudence pure) essayait
de faire valoir que la théorie normative du droit était la science dans
le sens d'une discipline scientifique de plein droit, munie
de sa propre théorie, n'ayant pas besoin de recours aux d'autres
disciplines scientifiques, soit sociales comme la sociologie
ou l'histoire, soit aux sciences exactes pour y emprunter ses
méthodes et sa légitimisation à la fois13, me paraît en plein accord avec
la tradition de la science éuropéenne et donc de la raison
européenne. Toutes les disciplines des sciences humaines et sociales
en éprouvaient le besoin et essayaient d'y parer plus ou moins
de la même façon : en déclarant d'avoir trouvé leurs propre
champs d'investigation, leur propres méthodes, leur propre théorie.
De ce point de vue la théorie pure du droit participe pleinement
à ce que je crois comprendre sous le concept de la raison
éuropéenne. Mais il est très significatif en plus que la théorie
pure du droit refuse explicitement de considérer le droit comme
la métanarration pour une éthique, qu'elle refuse de s'octroyer
le droit de décider ce qui est moralement bon ou mauvais, qu'elle
ne porte pas de jugement de valeur sur le contenu de la norme,
sur ce qui doit être, qu'elle ne nous dit pas si une loi est
juste ou injuste, seulement si elle est correcte ou incorrecte,
c'est-à-dire si elle est ou non bien faite. Est-ce son avantage
ou son désavantage? Il me semble significatif de ce point de
vue que la théorie pure du droit a repris de l'arsenal de la
philosophie kantienne son dualisme cognitif et pas du tout son
impératif catégorique : il n'appartient pas au droit de se prononcer
sur notre conduite morale individuelle; bonne ou mauvaise, c'est
à notre conscience d'en décider, d'en porter la responsabilité,
et en cela, nous sommes seuls et nous le resterons toujours.
C'est par contre pour ce qui est ou devrait être notre conduite
morale individuelle que l'impératif catégorique joue pleinement
son rôle, les normes de droit ne pouvant que circonscrire les
limites et les bornes de nos actions. Elles peuvent nous protéger
à la rigueur contre la mauvaise action des autres, mais les
normes du droit elles-mêmes sont et resterons impuissantes
contre nous-mêmes, c'est-à-dire contre notre intention de
commettre un mal, contre notre mauvaise volonté.
Intelekt a vùle: èistá teorie práva a evropský rozum
Autor ve své stati nazvané Intelekt a vùle, èistá teorie
práva a evropský rozum reaguje na téma Øímské právo,novodobá
vìda:evropský rozum, které tvoøilo jedno z témat mezinárodní
konference "Science, droit et éthique en Europe", uspoøádané v
Paøíži Forem Diderot v prosinci 1995. Klade si otázku, nakolik
øímské právo mohlo ovlivnit vznik novodobé vìdy a zda èistá teorie
právní - normativní teorie právní Hanse Kelsena a Františka
Weyra právem náleží - vzhledem ke kritikám, s nimiž se setkala
- do tradice evropského rozumu. Na tuto otázku odpovídá jednoznaènì
kladnì: normativní teorie právní byla v právní teorii vìdomì
filosoficky dìdièkou kantovské a novokantovské tradice. Zejména
F. Weyr se hlásil celý život k tradici kantovského a schopenhauerovského
noetického dualismu, jak je patrné z jeho odborných prací a z
jeho dosud nevydaných pamìtí.
The Intelect and the will: the pure theory of law and the european Reason
The author reflects critically in his paper The Intelect
and the will, the pure theory of law and the european Reason
the proposition Roman law, modern science: european Reason
which was one of the themes proposed by the symposium "Science,
droit et éthique en Europe" organised in Paris by the Forum Diderot
in december 1995. He is asking the question how much could helped
the Roman law to create the modern science as suggested by the
above mentioned theme and he tries in the second part of his
paper to evaluate the place and the role of Hans Kelsen's and
František Weyr's pure theory of law (the normative theory of
law) within the tradition of the european Reason. As he suggests,
this particular theory was fully and consciously indebted to
the tradition of kantian and neo-kantian philosophy. It was František
Weyr, one of the founders of this theory, who considered himself
all the long of his life to be profoundly bound by the tradition
of Kant's and Schopenhauer's noetic dualism as he consistently
and clearly stated in his professional work (in his books and
studies) as in his as yet unpublished memoirs as well.
Footnotes:
1* [4em]Le présent article s'inspire
largement de la communication destinée originairement à être
présentée au Forum international de l'Association Diderot, "Science,
droit et éthique en Europe", section Droit romain, science
moderne : la raison éuropéenne, organisé par M. Dominique Lecourt
en décembre 1995 à Paris. L'actualité du jour (la grève générale
des transports) ne m'a pas permis au dernier moment d'y participer
et ma communication n'a pas été publiée non plus. Le présent
article reprend plusieurs idées de cette communication en les
développant. Il conserve le titre de la communication originel
et son ton legérement polémique.
2[4em]Telle
était la thèse principale de la section Droit romain, science
moderne : la raison éuropéenne du colloque international
"Science, droit et éthique en Europe". Voir la note signalé par
l'astérix.
3[4em]Il suffit
de consulter le livre de William M. Johnston, L'esprit viennois,
ch. 6, PUF 1985 (1972 pour l'édition originale américaine) pour
s'en rendre bien compte ou l'article récent de Barry Smith, "L'Autriche
et la naissance de la philosophie scientifique", in : Actes de
la recherche en sciences sociales, octobre 1995, N°
109.
4[4em]Franti(unknown char)ek
Weyr fut un ami très proche de Hans Kelsen (1881 - 1973), bien
qu'aujourd'hui reste ce détail un fait divers historique peu connu
et bien que le nom de Franti(unknown char)ek Weyr ait été menancé d'un oubli
presque complet. Ce n'est plus le cas, heureusement, je ne veux
que rappeler que Franti(unknown char)ek Weyr était né à Vienne dans une famille
tchèque (- son père était un mathématicien célèbre, professeur
à l'Université de Vienne - et il est mort à Brno, en Tchécoslovaquie,
la République tchèque aujourd'hui, en 1951. Il étudia son droit
à Prague à l'Université Charles où il soumit aussi sa thèse d'habilitation
en 1909. Il soutenait déjà dans sa thèse les rudiments de la
théorie pure du droit aussi bien que dans un autre ouvrage rédigé
cette fois-ci en allemand (Zum Problem eines einheitlichen
Rechtssystems, 1909). Devenu professeur du droit publique à la
Polytechnique tchèque de Brno, après avoir travaillé plusieurs
années au sein de l'administration et dans le Bureau de Statistique
du Royaume tchèque, il a aidé après la Grande Guerre et la création
de la Tchécoslovaquie de former toute nouvelle Université Masaryk
de Brno. Il développa très vite sa théorie pure du droit , en
profitant beaucoup de conversations avec Hans Kelsen et surtout
avec Karel Engli(unknown char), à l'époque professeur de la Polytechnique comme
lui et de ses travaux et de ses réflexions, comme il le rappelle
dans ses Mémmoirs. Il défendait la théorie pure du droit
dans nombre impressionant de travaux entre les deux guerres et
en créant toute une école à la Faculté de droit de l'Université
Masaryk de Brno. Grand professeur du droit public, démocrate,
conservateur, homme de culture - surtout de musique; de ce point
de vue Brno lui doit beaucoup - et haut fonctionnaire d'Etat
(il assuma pendant de longues années les fonctions du Directeur
de bureau d'Etat des statistiques à Prague, tout en continuant
son enseignement à l'Université Masaryk de Brno), il a pu assurer
à son ami Hans Kelsen le poste de professeur à l'Université allemande
de Prague à la fin des années trente. Il entretenait avec Kelsen
des rapports personnels et professionnels en l'invitant fréquemant
de Vienne à Brno et en dirigeant avec lui la Revue internationale
de la théorie du droit, rédigée et publiée par lui à Brno en
langue française dans les années vingt et trente, les autres
membres du comité de rédaction ayant été Léon Duguit, Louis Le
Fur, Gaston Jèze. Une personnalité hors de commun, il a participé
après la Grande Guerre en tant que député de l'Assemblée nationale(
en 1918-19) aux travaux de rédaction de la Constitution tchécoslovaque.
Il a participé de nouveau après la 2e Guerre mondiale aux délibérations
du comité consultatif de l'Assamblée nationale en vue de rédaction
d'une nouvelle Constitution. Weyr fut littéralement soit ignoré
soit attaqué de son vivant par la Faculté de droit de Prague
et par nombre assez impressionnant d'adversaires, toutefois il
fut reconnu internationalement entre les deux guerres comme grand
spécialiste du droit public tchécoslovaque et comme l'éminent
spécialiste de la théorie pure du droit En témoigne entre autres
sa bibliographie au nombre d'une soixantaine titres, publiée
dans le livre de Hans Kelsen, Reine Rechtslehre (La théorie
pure du droit). Leipzig et Vienne 1934. Ecarté de la vie publique
pendant l'occupation nazie aussi bien qu'après le putsch de Prague
par le pouvoir communiste en 1948, son nom a disparu presque
de mémoire. Pendant ce temps-là sa théorie pure du droit fut
tout d'abord vivement contestée en Tchécoslovaquie, aussi bien
que la théorie de son ami Kelsen, pour être ignorée ensuite comme
l'étaient ses auteurs et ce n'est qu'en 1991 à l'ocasion du 40e
anniversaire de sa mort que la Faculté de droit de l'Université
Masaryk, que Weyr avait aidée de créer, se souvenait de lui en
organisant un colloque en son honneur.
5[4em]Cf. Weyr, F.: Teorie
práva (La Théorie du droit). Brno - Prague, Orbis
1936, p. 357 - 358. Franti(unknown char)ek Weyr considérait dès le début la
théorie normative - ou la jurisprudence pure - comme üne doctrine
philosophique" ou comme une "philosophie du droit" s'occupant
de la "forme du droit", l'écartant "complèment des théories connues
sous ce nom (mais) qui visent le fond du droit" (voir Franti(unknown char)ek
Weyr, "La théorie normative. Ses bases et sa signification pour
la jurisprudence", in : L'annuaire scientifique de la Faculté
de droit de l'Université Masaryk à Brno. Vol. IVe, 1925, pp.
8-9.
6[4em]Weyr,
F.: o.c., p. 28.
7[4em]Weyr, F.:
o.c., p. 24
8[4em]Weyr, F.: o.c.
§ 4 p. 34 sq.
9[4em]Weyr,
F.: o.c., pp. 34-35, notes 1 et 2
10[4em]Weyr, F.: o.c., § 28, p. 144 et sq.
11[4em]On peut s'en
rendre compte à l'aide de plusieurs ouvrages de Fr. Weyr ainsi
qu'à l'aide de ses Mémoires, restés en manuscript mais dont
les Editions Atlantis sont en train de préparer la publication.
12[4em]Cf. Weyr, F.: Mémoires, ch. 10. Il y
rappelle l'importance que l'avait pour lui la philosophie d'Arthur
Schopenhauer pedant Grande Guerre; il l'avait étudiée déjà à
Vienne bien avant la guerre avec la philosophie de Otto Weininger
et de Hans Vaihinger.
13[4em]Cf. Weyr,
F.:"La théorie normative. Ses bases et sa signification pour
la jurisprudence", o. c., p. 15
File translated from
TEX
by
TTH,
version 3.00.
On 17 Jun 2001, 16:06.